La route est longue mais la pente est étroite
Ma collègue est sortie de la classe après y avoir passé trois heures, à observer mon élève troublé-du-comportement, et deux ou trois de ses petits camarades bercés plus ou moins près du mur, pour savoir comment essayer de les aider. Près de la porte, elle m'a dit tout bas : "en 32 ans de carrière, j'ai jamais vu une classe aussi difficile".
Il faut croire que j'ai plus de ressort que je ne le crois habituellement, parce que je ne suis pas directement allée raccrocher mes gants devant le bureau de l'inspecteur, avant de me créer un compte sur apec.fr. Je me suis dit que c'était pas de ma faute, que début octobre ça ne pouvait pas être de ma faute, et qu'une fois arrivée en juillet je serai fière de moi.
Une fois arrivée, si toutefois j'y arrive autrement qu'en ambulance depuis l'hôpital psychiatrique où cette bande d'adorables fracassés de la tête risquent bien de me conduire.
Mais même si je ne suis pas sûre de tenir le coup, le fait que, cette année et contrairement à l'année dernière, la difficulté de mon quotidien soit admise par mes collègues comme quelque chose que je subis - et pas quelque chose que je provoque - ça m'a aidée aujourd'hui à profiter des dix minutes de calme à l'accueil de l'après-midi. Dix minutes où tous les enfants, même Malcom, même Kevin, se sont assis, ont écouté la musique que j'avais mise, ont dessiné ou chuchoté avec leur voisin. Tranquillement, paisiblement.
Et puis même, un peu après, la séance sur la forêt qui leur a plu. Et encore après, un peu d'arts visuels, avec de la vraie peinture dedans, et pas trop d'agitation.
Finalement, si cette année qui s'annonce longue pouvait m'apprendre à me contenter de ce qui va bien, elles mériteraient que je les adopte, les 22 teignes.