L'essence de térébenthine
L'autre jour, dans le bus, un type d'une soixantaine d'années était debout à côté de moi. Barbe courte et blanche, chapeau, carton à dessin à la main. Il regarde NanoSidi, collée contre moi en mode koala, et vérifie ma théorie des vieux qui font des sourires.
Je lui renvoie mon sourire spécial vieux (je le travaille en vue de mon futur mariage avec Michel Piccoli) (faut plus trop traîner), et d'un coup, je sens une odeur d'essence de térébenthine.
Quand j'étais en primaire, j'avais un copain de classe qui s'appelait Joachim et dont la mère était prof de dessin. Elle était divorcée, et ils vivaient tous les deux dans un ancien atelier qui avait plusieurs étages. Je trouvais ça magique, surtout quand mes parents disaient : "ah non mais ces vieux machins, c'est impossible à chauffer". Si aujourd'hui j'habite dans un appart avec 4 mètres sous plafond et des mezzanines, Joachim et sa mère n'y sont sans doute pas pour rien - faut-il préciser que mes parents n'ont pas changé d'avis non plus et le font savoir avec plus ou moins de doigté ?
Joachim dessinait très bien. Des scènes immenses remplies de constructions compliquées, de chevaliers minuscules, de Monstroplantes et de dinosaures. Sur ses cahiers de poésie, il coloriait avec des pastels que sa mère recouvrait ensuite d'essence de térébenthine.
Dire que MilliSidi a presque l'âge de Joachim et de ses cahiers qui sentaient l'odeur magique.