Nature morte

La maison est en pause. Les filles sont parties 3 jours chez leurs grands-parents, et je travaille chez moi pour préparer la reprise. Je regarde la maison comme à travers le trou d'une serrure, j'ai l'impression de ne pas la reconnaître.

Pas de bruit, sauf la radio de temps en temps - c'est-à-dire que, contrairement à ce qui se passe d'habitude, on entend la radio sans avoir besoin de coller son oreille sur l'enceinte pour tenter de faire abstraction du boxon environnant.

Et surtout, les objets ont arrêté de se déplacer tout seuls. Je peux par exemple effectuer cette instructive expérience : je regarde une chaise du salon, puis je lui tourne le dos pendant une minute, et la regarde à nouveau ; aucun doudou, aucune soucoupe de dînette ne sont venus s'y asseoir, personne n'y joue à la maîtresse ou y émiette consciencieusement une biscotte. Les piles de papier brouillon stockées sur l'étagère restent en forme de pile. Et si un manteau est posé sur la malle de l'entrée, c'est parce que c'est MOI qui l'y ait posé. D'ailleurs, n'importe quel décorateur d'intérieur vous le dira : mon manteau posé par moi sur une malle, c'est feng-shui, on dirait du Philippe Starck.

La maison est en pause, peut-être que ça lui fait du bien, comme à moi. Peut-être qu'elle aussi a hâte qu'elles reviennent.